Chroniques

par bertrand bolognesi

forum des nouveaux compositeurs hongrois – épisode 1
Máté Balogh, Bálint Horváth, László Sándor et Jonátan Zámbó

Máté Hámori dirige l’Óbudai Danubia Zenekar
CAFe Budapest / Budapest Music Center
- 9 octobre 2017
le chef d'orchestre Máté Hámori joue les jeunes compositeurs hongrois
© ritter doron

Il y a un peu plus de deux ans, nous vous parlions, à l’occasion du Printemps de Budapest (Budapesti Tavaszi Fesztivál), d’un autre festival dans la capitale hongroise, ayant lieu à l’automne. Outre de très nombreux concerts, qui explorent les musiques savantes et populaires, CAFe Budapest investit les arts plastiques, le théâtre et la danse. Il présente également la particularité d’accueillir un concours biennal – Új Magyar Zenei Fórum Zeneszerzőverseny (forum des nouveaux compositeurs hongrois). Pour commencer notre semaine à la découverte de l’événement, nous assistons aux deux soirées de gala des finalistes [lire notre dossier d’avril 2015].

Le but de ce concours est, naturellement, d’encourager la création et d’aider les jeunes compositeurs, de plusieurs manières. Trois prix sont attribués, dans deux catégories distinctes : musique d’ensemble et musique symphonique*. Non négligeables, ils ne sont cependant pas l’essentiel : ces distinctions ouvrent vers des collaborations fructueuses, qu’il s’agisse de rencontres radiophoniques, de promotion auprès d’éditeurs, de sessions à la Fondation Péter Eötvös et de projets à long terme entre les lauréats et divers orchestres.

Cette année, il était demandé aux vingt-neuf candidats (venus principalement de Hongrie, de Transylvanie, de Voïvodine et du Canada) d’honorer à leur manière la mémoire de Zoltán Kodály, né il y a cent trente-cinq ans et disparu il y en a cinquante. À l’initiative du Budapest Music Center (BMC) et du Művészetek Palotája (MÜPA), cette cinquième édition de l’Új Magyar Zenei Fórum Zeneszerzőverseny fait entendre aujourd’hui les œuvres des quatre finalistes en musique d’ensemble, dans la première salle citée.

Les musiciens de l’Óbudai Danubia Zenekar ouvrent la soirée avec Exit (Körtéfa) de Bálint Horváth (né en 1986), page méditative qui travaille la tonicité des attaques et les timbres mêlés, à l’aide d’un instrumentarium choisi (trois violons, alto, violoncelle, contrebasse, cymbalum, harpe, flûte, clarinette avec clarinette basse, basson, cor, percussion et célesta). Court changement de plateau, ensuite, pour Kristály-madár a gyöngyöző cseresznyék között (Oiseau de cristal…) de László Sándor (né en 1975), opus de délicate facture qui prend appui sur la virevolte du piccolo dans le statisme relatif des frondaisons (quatre violons, deux altos, deux flûtes avec piccolos, hautbois, cor anglais, cor, deux trombones, cor, percussion).

Quant à lui, Jonátan Zámbó (né en 1992) concentre l’effectif sur les seules cordes (quatre violons, deux altos, deux violoncelles, contrebasse et piano) pour sa Méditation. Il plonge les mains du pianiste dans la bête, cultivant un son situé entre cymbalum et clavecin. Conçue dans une veine relativement répétitive, la pièce, que trousse une profonde sensibilité, conjugue un caractère immuable et une tonicité accidentelle tout-à-fait intéressants. Après avoir passé les deux tiers de sa durée sur les cordes, le pianiste s’installe au clavier puis, après un peu de temps encore, recouvre l’usage des pédales : ainsi assiste-t-on au réinvestissement du piano classique depuis d’autres modes de jeu, plus ancestraux. À la fois poétique et aboutie, cette proposition, où affleure une réminiscence de Kodály dans un rituel irrégulier à la Feldman, est conclue, d’un grand geste au sourire tendre, par une très brève cadence pianistique suspendue dans la vacuité délicieuse d’un éventail debussyste.

Après les cordes, les vents et les percussions, dans Pseudomarsch de Máté Balogh (né en 1990), avec des officiants placés en symétrie. Au centre, deux trompettes. S’alignent à leur droite (notre gauche) basson, clarinette avec clarinette en mi, hautbois et flûte. À leur gauche : basson, clarinette avec clarinette basse, hautbois et flûte. Sur le deuxième rang, cor et tuba au centre, avec un trombone de chaque côté. Enfin, à l’arrière, trois percussionnistes. Engagée par les percussions, la pièce se promène dans des souvenirs stravinskiens assez pauvrets, au fil d’un collage terne. Que nous réservent les finalistes de la section symphonique ?

BB

* Le premier prix en musique d’ensemble s’élève à cinq cent mille forints, soit environ mille six cents euros, le deuxième à trois cent soixante-quinze mille forints (mille deux cents euros) et le troisième à deux cent cinquante mille forints (huit cents euros). Le troisième prix en musique symphonique s’élève à cinq cent mille forints (mille six cents euros), le deuxième à sept cent cinquante mille forints (deux mille quatre cents euros) et le premier à un million de forints (trois mille deux cents euros)