Chroniques

par katy oberlé

Hector Berlioz | Grande messe des morts Op.5
Mikko Franck dirige John Irwin, le Chor des WDR,

Chœur et Orchestre Philharmonique de Radio France
Philharmonie, Paris
- 27 avril 2018
Mikko Franck joue la Grande messe des morts Op.5 de Berlioz
© christophe abramowitz | radio france

Quatre ans après l’avoir donnée à la Cathédrale Notre-Dame de Paris, le Chœur et l’Orchestre Philharmonique de Radio France jouent aujourd’hui la Grande messe des morts Op.5 d’Hector Berlioz à la Philharmonie de Jean Nouvel. Aux forces chorales de Radio France, conduites par Nicolas Fink, vient s’ajouter le Chor des Westdeutschen Rundfunks, dirigé par Robert Blank. Sans oublier que la musique française fait partie de l’ADN du Philhar’, il est évident que le beau travail effectué à sa tête par Gustavo Dudamel en ce fameux soir de janvier 2014 [lire notre chronique] a laissé des traces positives dont aurait pu bénéficier Mikko Franck.

À lire plusieurs confrères [lire nos chroniques du 11 juin 2015 et du 26 avril 2018, entre autres], on arrive à la grande salle non sans quelque appréhension. Comment le monumental Requiem de Berlioz sonnera-t-il dans cette acoustique dont furent maintes fois relevées les imperfections et l’ingratitude [lire notre chronique du 19 avril 2016, par exemple] ?... Pas si mal, finalement, si l’on garde à l’esprit que ce type d’œuvres est généralement exécuté dans des lieux qui n’ont pas été spécialement conçus pour la musique. Il faut dire aussi que je suis installée au cœur du parterre, à une dizaine de rangs du plateau, ce qui contribue à une réception optimale du concert. Encore peu habituée à ce lieu où je ne me rends pas fréquemment, mes lignes rendent compte uniquement de ma perception là où j’étais assise, les auditeurs du balcon voudront bien m’excuser s’ils ne retrouvent pas leur sentiment dans cet article.

Mikko Franck est bien décidé à ne pas traîner.
C’est ce qui s’impose dès les premiers moments de sa lecture. Le caractère laïc de la salle contribue à en renforcer encore l’absence de recueillement. Le Dies irae confirme le pas un peu pressé de cet office. Le rendu des salves de cuivres spatialisées est d’une saine efficacité. En comparaison, le Tuba mirum paraît tout de même timide, c’est bizarre. On perd aussi l’articulation du Quid sum miser, alors que les inserts instrumentaux sont, a contrario, d’une grande précision. Rex tremendae est traversé par une urgence dont on ne sait quoi penser… surtout qu’elle fait l’impasse sur de nombreux détails. Plus on avance dans l’œuvre, moins il est facile d’accepter d’être privé du contenu spirituel. Quaerens me est techniquement respectable, mais c’est insuffisant. Avec sa tartufferie coutumière, le religieux est de la partie, lui ; on s’en serait bien passé. La suite devient ridicule, avec un Lacrymosa… d’Offenbach !!! Sans compter les ténors braillards, à peine justes. Après un mièvre Offertorium de sacristie de garnison, l’Hostias est presque pénible. Pourquoi avoir choisi John Irwin ? Rien d’aérien à son Sanctus, mais un cantique poussif, strident et tremblé, parsemé de ports de voix véristes – à en tordre les croix de cimetière ! Il faut beaucoup, beaucoup d’imagination pour ressentir le mystère de l’agneau de dieu…

À ce stade du concert, il ne fait plus de doute que Mikko Franck n’a aucune affinité avec cet opus. L’étirement de la séquence conclusive ne tient pas de la componction mais de l’interruption chronique de la pensée. Heureusement, c’est presque fini !

KO