Chroniques

par gérard corneloup

voix célestes pour une basilique
ensembles William Byrd et Stile Antico

Festival de La Chaise-Dieu / Brioude et Chamalières-sur-Loire
- 23 et 24 août 2012
le jeune compositeur gallois Paul Mealor au Festivazl de la Chaise-Dieu
© dr

La basilique en question n’est autre que celle de l’ancestrale Saint Julien de la haute Limagne, lieu qui reçoit volontiers, chaque année depuis des lustres, un des concerts « décentralisés » du Festival de La Chaise-Dieu, lui faisant bénéficier de sa fort bonne acoustique dont la finesse, l’absence d’aspérités et le relief font un cadre idéal pour la musique vocale.

C’est justement le cas, avec l’un des experts en ce domaine, l’ensemble britannique William Byrd qui aborde un panorama allant du XVIe au XXe siècle, comptant de grands noms comme Josquin des Prés et des peu connus sinon des oubliés, tel Jacobus Clemens Non Papa, d’un Miserere tout de ductilité de Thomas Tallis à un motet plein d’émotion du Français Jean Mouton, en passant par un autre de John Sheppard. Des mondes, ou plutôt un monde à la fois multiple et unique, où la direction attentive de maestro O’Reilly fait merveille, où les chants se fondent en un alliage précieux, à peine déprécié par les voix de dessus occultant par trop une basse superbe mais par trop timide.

Ledit chanteur semble nettement plus présent dans le second volet du concert, illustrant le siècle récemment passé. Samuel Barber et William Harris assurent la continuité d’un chant bien conduit, bien mené, refusant les effets et le pseudo modernisme, le premier avec un Agnus Dei, le second avec un Bring us, O Lord God.

Leur cadet Henryk Górecki adopte une écriture plus extériorisée, avant qu’un Herbet Howells se lance dans un motet imaginé pour la mort du président Kennedy et que le contemporain Paul Mealor [photo], né en 1975, livre une pièce aguicheuse qui n’ajoute pas grand’ chose au programme, mais s’avère bourrée de difficultés vocales dont les interprètes se jouent avec brio.

Le lendemain, autre concert décentralisé, dans une acoustique excellente ; mieux : fascinante, enivrante, tant les sons se mêlent, se fondent, s’unissent avec bonheur dans le chœur de l’église romane Saint Gilles de Chamalières-sur-Loire, en cul-de-four et heureusement doté de vases acoustiques médiévaux toujours à l’œuvre. Comme à Brioude, il s’agit de savourer quelques pages de musique vocale enfantées par la Renaissance. Avec un changement pourtant : c’était des habitués hier, des routiers, ce sont aujourd’hui des petits nouveaux, ou presque ; avec un plaisir égal, complété par celui de la découverte, pour bien des mélomanes.

Pourtant étoffée, variée, diversifiée, la liste est unanimement bien servie, avec un art parfait du chant, du dosage sonore, des attaques et des points d’orgue. Avec, aussi, cette complicité du regard, créatrice, qui crée l’union des voix, des chants, du chant. Nicolas Gombert ouvre le bal avec certain Magnificat primi toni ; Praetorius et Victoria le concluent, l’un avec O magnus mysterium, l’autre avec Tota pulchra es. Sans parler de Lassus, Byrd, Tallis, Gibbons et quelques autres. Tous sont à la fête. Nos jeunes chanteurs et chanteuses se paient même le luxe d’aborder le XXe siècle avec John Maccabe et son Woefully Arrayed, d’une infinie difficulté vocale, fort bien servi.

En conclusion : un jeune ensemble à suivre de près et un site où musique et chants sont sublimés. On en redemande.

GC