Chroniques

par laurent bergnach

Eve Beglarian
œuvres variées

1 CD New World Records (2006)
80630-2
Eve Beglarian | œuvres variées

Compositrice, productrice et interprète – comme c'est le cas pour sa pièce Landscaping for Privacy (1995) –, Eve Beglarian a beaucoup œuvré pour la musique de scène (théâtre musical, danse, performance multimédia), répondant à des commandes de formations diverses : Bang on a Can All-Stars, the California EAR Unit, Relâche, Dinosaur Annex ou encore MATA Ensemble et The Paul Dresher Ensemble que l'on retrouve sur ce disque. Sa musique est-elle post-minimaliste, ainsi qu'on la juge souvent ? Ce qui est sûr, c'est que d'expérimentations en libérations, l'Américaine de souche arménienne, née le 22 juillet 1958, défriche son chemin à sa guise, pas tant en s'opposant aux règles établies qu'en contournant celles qu'elle peut ignorer.

Tell the Birds regroupe six créations assez récentes (1994-2004), un assortiment de pièces à la fois cohérent et agréablement éclectique. Quatre d'entre elles empruntent les textes d'écrivains aussi variés que William Blake, Czesław Miłosz, ou les poètes américains Linda Norton et Stanley Kunitz. Les narrateurs se succèdent, homme ou femme, neutres ou théâtraux. Les mots peuvent être récités à la manière d'un mantra (on pense parfois au travail de Laurie Anderson), de façon comique ou comme une sorte d’hommage au Reich de The Desert Music. Dans la courte pièce pour orgue et bande magnétique Wonder Counselor (1996), la voix féminine est même réduite à des gloussements.

Pour accompagner soliste ou narrateur, la compositrice n'hésite pas à convoquer la musique de la rue, ou directement les mannes des maîtres passés. Ainsi, on trouve dans The Marriage of Heaven and Hell (1994) des syncopes de jazz, des accents afro-cubain, le choral de Bach Es ist genug, et dans Creating the World (1996), se greffant sur une nappe électroacoustique, une mélodie médiévale, une lamentation du Moyen Orient, un échantillon de Mozart ou un final très rock. Et bien sûr, le chant des oiseaux n'est jamais bien loin…

LB