Chroniques

par anne bluet

Georges Onslow
Grand quintette Op.76 – Grand sextuor Op.77bis

1 CD Signum (2001)
SIG X119-00
Georges Onslow | œuvres avec cordes

Parce qu'issu d'une famille anglaise de vieille noblesse et n'écrivant que (!...) de la musique de chambre, le grand public français de l'époque considérait avec mépris l'œuvre de son compatriote, Georges Onslow. Né en 1784 et mort en 1853 à Clermont-Ferrand, Onslow étudie le piano à Hambourg avec Johann-Ladislav Dussek, en Angleterre avec Johann-Baptist Cramer – peut-être aussi avec Hullmandel. Sa vocation de compositeur s'éveille avant ses vingt ans, et il livre ses premiers opus en 1806. L'année suivante, il étudie la composition avec Anton Reicha. Apprécié par Schumann, Mendelssohn et Berlioz (« C'est lui, qui depuis la mort de Beethoven, porte le flambeau de la musique instrumentale »), ce créateur laisse un catalogue comprenant trois opéras – L'Alcade de la Véga (1824), Le Colporteur (1827), Le Duc de Guise (1837) –, quatre symphonies et une multitude d'œuvres chambristes : trente-quatre quintettes, trente-six quatuors et vingt-sept compositions avec piano.

Constituée de jeunes musiciens ayant achevé leurs études, l'Académie d'Orchestre de l'Orchestre Philharmonique de Berlin propose ici le Grand Sextuor op.77bis (1849), œuvre concertante pour piano, laissant une certaine place aux autres instruments. Si la contrebasse se contente d'accompagner, la flûte de Colin Fleming est autorisée à des performances virtuoses qui nous rappellent combien l'œuvre de chambre d'Onslow est exigeante sur le plan technique. L'équilibre sonore est d'ailleurs réussi entre l'instrument à clavier et le quintette à vents qui livrent quatre mouvements, soit un passage héroïque, un Minuetto curieusement noté agitato, une mélodie joyeuse qui finit par s'assombrir et un finale Allegretto quasi allegro tout en douceur et décontraction. Enseignant dans le cadre même de l'académie susmentionnée, le pianiste Horst Göbel offre à cette interprétation un piano presque schubertien dont il nuance élégamment l'articulation. À la virtuosité de la flûte du Menuet succède le Thème varié, d'une facture assez terne qu'on dira épigone de Beethoven sans atteindre jamais au génie ; on le découvre dans une lecture irréprochable, quoique manquant singulièrement d'esprit, dont on remarque avant tout la sonorité avantageusement égale de Diethelm Adorf à la clarinette. Enfin, le Finale est gentiment phrasé.

Autre œuvre tardive présente sur ce CD : le Grand Quintette avec piano Op.76 (1848). Il débute dans un climat général épique, avec un thème expressif, qui semble tout autant connu que nouveau. D'abord martial, ce mouvement prend par la suite des allures d'Adagio mozartien, en offrant un bel équilibre entre les cinq protagonistes.Hans Maile y impose magnifiquement le chant de son violon. Autre familiarité : le troisième mouvement, après un Scherzo un rien plaisantin, ici délicatement nuancé dans une réalisation à la fois sensible, tonique et expressive, est une citation de sa première Sonate pour piano à quatre mains Op.7, éditée en 1811 ; il fait la part belle au violoncelle un rien théâtral d'André Saad. Quant au Finale, ce Coup de vent, Allegro animato, qui peut compter parmi les premières tentatives françaises de musique à programme, et annonce à sa manière les univers de Duparc ou Lekeu, il nous est offert dans une belle dynamique, solidement affermie par Akira Akahoshi à la contrebasse.

AB