Chroniques

par samuel moreau

Giacomo Puccini
Tosca

1 DVD Deutsche Grammophon (2006)
00440 073 4100
Giacomo Puccini | Tosca

Le 23 août 1896, plus de trois ans avant la création de Tosca (en janvier 1900, à Rome), le librettiste Giuseppe Giacosa ne sait que faire d'une première ébauche tirée de la pièce de Sardou par son prédécesseur : « La rapidité de l'action, son caractère flagrant, de même que la condensation habile qu'en propose Illica semblent appropriés (à l'Opéra). Mais plus on étudie les scènes pour y mettre quelque chose de poétique ou de chantable, plus on se convainc qu'un tel sujet est incompatible avec la scène lyrique ». Heureusement, le temps a passé depuis ces doutes de dramaturge, les menaces de cabales et les remarques acerbes des premiers critiques musicaux (français, pour la plupart) ; bousculant tous les conformismes de la censure et de la routine, le chef-d'œuvre de Giacomo Puccini a, depuis, gagné ses admirateurs inconditionnels qui, avec Franco Zeffirelli, le définiront comme « le plus sublime des opéras jamais composés ».

En 1985, au Metropolitan Opera, l'Italien monte pour la seconde fois ce drame lyrique, envisagé telle une corrida où trois personnalités de la vie romaine, au départ pleins d'assurance et de fierté, finissent par mordre la poussière au terme de cent vingt minutes de coups de théâtre. On s'en doute : ici, pas d'arène ni de sable, mais des reconstitutions bluffantes de la nef baroque de Sant'Andrea della Valle (sa profondeur, sa lumière), d'une salle du Palazzo Farnese (sa cheminée, ses niches) et d'une coupe du Castello Saint'Angelo (sa terrasse, ses cachots), plus une scénographie impressionnante à la fin de l'Acte I. Tout démarre très fort, d'autant que Giuseppe Sinopoli recueille un son précis et ciselé d'un orchestre souple et vivant (à part les vents, moribonds) et à qui on pardonnera quelques ralentis malvenus pour la vigueur de ses attaques.

Mais pour notre malheur, ici, on ne rit pas, on pleure ! Après le sacristain stéréotypé d'Italo Tajo peu avare en parlando, on souffre de découvrir Plácido Domingo tout en force et nasillard – il faut attendre O dolci mani... pour rencontrer un peu de nuance – ainsi que la Tosca empotée d’Hildegard Behrens. Armée d'un aigu assez dur et d'une diction déplorable, la célèbre wagnérienne apparaît mal à l'aise dans le style autant que dans le personnage. Comment applaudir son épouvantable Vissi d'arte ? Quant au Scarpia de Cornell MacNeil, geignard et faux, on se réjouit assez tôt de son absence au troisième acte. Un berger et un gardien de prison à leur place, c'est bien peu pour compenser notre immense, immense déception.

SM