Chroniques

par anne bluet

Marc-Antoine Charpentier
Judicium Salomonis – Motet pour une longue offrande

1 CD Virgin Classics (2006)
0946 3 59294 2 3
Marc-Antoine Charpentier | Judicium Salomonis – etc.

C'est en 1702, soit deux ans avant de mourir, que Marc-Antoine Charpentier composa l'une de ses dernières grandes pages, le fort bel oratorio Judicium Salomonis H.422 dont William Christie et ses Arts florissants offre aujourd'hui une gravure d'une plasticité hors du commun.

La clarté de la Symphonie convainc, introduisant idéalement un Premier Narrateur d'une précision remarquable, soit le jeune Marc Mauillon, baryton qui révèlera plus tard dans ce disque des qualités de timbre fort attachantes, au service d'une précieuse dynamique. Outre que la prestation spécifiquement chorale, toujours très exactement équilibrée, ne pose aucun doute, le plateau vocal réunit sur cette galette se montre efficace et bien choisi. À commencer par Paul Agnew, parfaitement aguerri à ce répertoire : il fait profiter de la moindre nuance, tant musicale que littéraire par une approche non seulement sensible mais aussi intelligente que gracieuse. Le recueillement de la Symphonie de la seconde partie plongera l'auditeur dans un climat soudain plus grave, Christie s'évertuant à en révéler la force dramatique par un fin travail de couleur et une savante articulation.

Il est alors temps de découvrir le Dieu de Neal Davies, basse dont le chant trouve une bienveillante autorité, malgré un grave parfois trop confidentiel. Si l'on regrettera une Vraie Mère peut-être un peu légère et sans aura – Ana Quintans –, la composition de la haute-contre Marc Molomot en Fausse Mère s'avère belliqueuse à souhait, usant de toute les possibilités expressives de la voix, dont par ailleurs la stabilité n'est pas toujours précisément garantie.

De trois ans son aîné, le Motet pour une longue offrande H.434 trouve au disque une tonicité allègrement contradictoire avec la relative solennité du précédent Jugement de Salomon. Les parties de chœur y paraîtront enjouées et même enlevées, tandis que les interventions solistes hautes en couleur : la jeune basseJoão Fernandes leur offre un socle solide, tandis le timbre lumineux de Leif Aruhn-Solén les fait idéalement briller.

AB