Chroniques

par hervé kœnig

récital Arturo Benedetti Michelangeli
Auditorium RTSI de Lugano (1981)

1 DVD TDK (2004)
DV-MPSR
récital à l'auditorium RTSI de Lugano (1981)

Le 7 avril 1981, le pianiste Arturo Benedetti Michelangeli donnait un concert à l'auditorium RTSI de Lugano, en Suisse. C'est ce récital qui occupe les quelques cent minutes de ce disque et s'ouvre avec la Sonate n°12 en la bémol majeur de Ludwig van Beethoven. D'emblée, sur l'Andante con variazioni, on remarque une sonorité très égale dans ce que propose cet artiste, à savoir un Beethoven beaucoup moins franc qu'à l'accoutumée, très secret, énigmatique (voir la variation IV, sans surjeu), annonçant un danger, mais sans mélodrame (variation III). On entend Haydn dans cette lecture classique et discrète. Le nerf et la tonicité apparaissent dans le Scherzo, mais sans aucune brutalité. La dignité et une certaine sécheresse habillent la Marche funèbre, mais le costume n'est ni théâtral, ni de mauvais goût – le pathos est absent. Les piquées-portées de la main gauche, très belles, ajoutent un raffinement supplémentaire à sa lecture. L'Allegro final, d'une sonorité particulièrement douce, achève l'œuvre sans jamais céder au cabotinage (rien qui ne s'indique de soi-même).

Une fluidité remarquable caractérise ensuite l'Allegro de la Sonate n°11 en si bémol majeur. La ligne est pure, et le pianiste laisse l'auditeur se débrouiller avec le tout. L'Adagio s'annonce schubertien, la main droite chantant discrètement un lied. Arrive, dès la modulation, une gravité infinie, mais sans excès d'expressivité – à la différence d'un mouvement lent de Mozart. Discrètement mélancolique, Michelangeli y retrouve une simplicité, avant d'aborder – distant et hautain – un Menuetto très contrasté. Le Rondo se déroule avec un certain d'effacement ; l'interprétation en est raffinée, plus par une différenciation précise des frappes que par une large palette de nuances.

Beethoven semble perdurer dans l'Allegro de la Sonate D 537 en la mineur de Franz Schubert. La dynamique est belle, le souffle très grand. L'artiste nous séduit par sa capacité à entretenir pensée et climat musicaux. Malgré tout, trop de franchise rend ce début de pièce simpliste, voire terne, et l'on s'ennuie. L'Allegretto qui suit, s'il sait être tendre (2ème thème), manque de poésie. Avec un retour au thème beaucoup plus fluide, on frise le lyrisme. Après un 3ème thème énigmatique et nuancé, le retour au 1er se fait avec une gentille simplicité. La coda est toute en douceur et discrétion. Des pianississimi ciselés apportent son cachet à l'Allegro vivace, dont le mouvement général très contrasté propose une belle dynamique.

Les Quatre Ballades de Johannes Brahms présentent une sonorité différente, moins claire que celle d'avant. Michelangeli touche plus aux couleurs qu'aux tempi, induisant des sonorités d'orchestre.

HK