Chroniques

par bertrand bolognesi

récital Elizabeth Balmas
Bach – Bartók – Bloch – Reger – Stravinsky

1 CD Passavant Music (2007)
PAS 2012
récital Elizabeth Balmas (alto) : Bach – Bartók – Bloch – Reger – Stravinsky

La violoniste Elizabeth Balmas offre un beau récital d'alto, pensé à la croisée de plusieurs influences. On y rencontre la transcription de la Fantaisie chromatique BWV 903 de Bach par Kodály (sans la fugue, on comprend aisément pourquoi), donnée dans une fluidité confondante que souligne délicatement une accentuation intelligente. L'artiste semble tenir compte à la fois de l'original et du regard qu'y jette le Hongrois en son temps. Son approche en est d'autant plus libre.

L'enchaînement avec un fragment de la Suite pour alto (1959) d’Ernest Bloch est heureux, dans une sonorité plus rugueuse bénéficiant d'une large palette dynamique. L'Elegy (1944) de Stravinsky surprend, dans une couleur très intérieure, pudiquement voilée, même. Elle développe ensuite un son plus gras, et retrouve la saisissante épure du début, dans un recueillement tout simple. Cette déploration pure est certainement le plus beau moment de ce CD.

La Suite en sol mineur Op.131d n°1 (1915) fait partie des dernières compositions de Reger qui, à la fin de sa vie, se tourna intensément vers la musique de chambre. Avec elle, le programme de cet enregistrement retrouve un classicisme désiré comme tel, où Bach parvient à côtoyer le néoromantisme brahmsien. Affirmant franchement la vibration tout en conduisant soigneusement la nuance, Elizabeth Balmas attaque vigoureusement le premier mouvement, puis se lance dans un Vivace d'une âcreté sautillante que contredit le legato infiniment souple de l'Andante. Le fougueux final bénéficie d'une mordante précision, ménageant toujours nuance et inventivité à la lecture générale, tonique et sensible.

Enfin, la musicienne a souhaité jouer la Sonate pour violon solo Sz.117 BB.124 de Bartók (1944) dans sa propre transcription pour alto. Outre que cette version paraîtra plus mâle que l'originale, la Ciaccona convainc peu, l'instrument semblant circonscrire cette musique dans un registre exclusivement confidentiel. Pourquoi pas, d'ailleurs, partant que l'intimité de cette page nous invite à l'écouter plus ouvertement, si je puis dire. Efficace s'avère le travail de couleurs qui révèle la vocalité de la Fuga, bien que les doubles-cordes accusent parfois certains soucis. La Melodia (troisième mouvement) bénéficie d'une demi-teinte exquisément expressive, comme prise dans le gel, et d'une réalisation idéale des harmoniques qui souligne l'énigme du climat. Quant au presto, il réunit les qualités de la section précédente au type de contraste attendu (et qui faisait défaut dans les deux premières parties), tout en chantant généreusement.

BB