Chroniques

par samuel moreau

récital Marilyn Horne
Festival de Lugano (1986)

1 DVD Silverline Classics (2003)
80002
concert au Festival de Lugano (1986)

Quel plaisir de retrouver l'immense Marilyn Horne dans ce concert suisse donné à Lugano le 3 juin 1986 ! La Diva américaine nous régale d'un programme consacré aux airs célèbres, qu'on divisera en trois cycles : la réforme allemande, les modernes français, le bel canto italien.

La mezzo-soprano débute son récital avec Divinités du Styx, de l'Alceste de Christoph Willibald Gluck. Si certains aigus sont un peu nasalisés, la voix, corsée comporte de beaux graves, la diction est quasiment parfaite et – tout à fait dans le style requis – le chant est calme tout en étant expressif. Tiré d'Orfeo ed Euridice, le récitatif Che disse ? arrive avec une grande facilité. Horne négocie honorablement les redoutables vocalises de l'air qui le suit (Addio miei sospiri) même si ce n'est pas toujours exactement sur la note. Elle se rattrape avec les deux dernières, magnifiquement réalisées. Viennent ensuite Campi Elisi / Canto degli spiriti beati, Che puro ciel extrêmement souple, planant au-dessus de sa voix. Un fulgurant Ahimé, dove trascorsi ? puis un rapide et angoissé Che farò senza Euridice terminent ce cycle.

Non, vous n'avez jamais... du trop rare Huguenots de Giacomo Meyerbeer, nous offre là encore des vocalises splendides. Marilyn Horne y déploie la préciosité qu'il faut, emballant l'air avec élégance et drôlerie. Intelligence aussi dans Camille Saint-Saëns : Mon cœur s'ouvre à ta voix (Samson et Dalila) est un air tout de nuances, mené par une voix large et sensuelle. Seul bémol à ce cycle : l'Habanera de Carmen, un peu scolaire.

TancrediOh Patria / Tu che accendi / Di tanti palpiti – et L'Italiana in Algeri sont les deux opéras de Gioacchino Rossini où la cantatrice à puisé quelques airs pour clore sont récital. Du second, Cruda sorte amor tiranno démontre à nouveau sa facilité à vocaliser, associée à certaines attaques tout en douceur. La Canzonetta spagnola lui permet une transition subtile vers un air de zarzuela magnifique et raffiné, donné en bis.

Fidèle pianiste de la chanteuse, Martin Katz dirige ici l'Orchestre de la Suisse Italienne, commençant le récital par l'Ouverture d'Anacreon de Luigi Cherubini. Il sert cette page proche à la fois de Beethoven et Berlioz par une lecture claire qui cependant ne dépasse jamais un relatif manque d'élégance ; c'est un peu pompier. Même réserve pour la Danza delle furie d'Orfeo ed Euridice : c'est tonique, mené avec beaucoup de caractère, mais le mystère installé au début reste sage, ne menant jamais aux enfers qu'on attend lors du développement. En revanche, l'Ouverture de L'Italiana in Algeri est jouée avec beaucoup d'esprit. Mention spéciale aux instrumentistes (clarinette, flûte, harpe...) dont l'Ouverture de Mignon, d'Ambroise Thomas, met en valeur les superbes soli.

SM