Chroniques

par laurent bergnach

Simon Steen-Andersen
Black Box Music – Run Time Error (#1+2)

1 DVD Dacapo Records (2014)
2.110413
Black Box Music et Run Time Error de Simon Steen-Andersen (né en 1976)

Né au Danemark en 1976, Simon Steen-Andersen étudie la composition à travers le monde, avec des professeurs aussi atypiques que Karl Aage Rasmussen, connu pour son travail sur la citation et le collage depuis le début des années soixante-dix, Mathias Spahlinger, improvisateur de jazz dans son jeune temps, Gabriel Valverde, créateur de nombreuses pièces électro-acoustiques, et Bent Sørensen, engagé sur les voies du folklore puis de la microtonalité. Résidant depuis à Berlin, le musicien s’apparente à un artiste sonore (dans l’héritage de Cage), à savoir que son travail intègre des notions comme la performance, l’installation ou la chorégraphie. Pour ce faire, la vidéo et l’amplification sont souvent sollicitées, comme le prouvent les deux œuvres ici réunies.

Black Box Music (Darmstadt, 2012) fut conçu pour le Norvégien Håkon Stene, percussionniste accompagné d’une quinzaine d’interprètes répartis dans la salle autour de trois autres percussionnistes. Derrière le soliste, un écran géant dévoile ce que font ses mains disparues dans la boite noire posée devant lui. Durant l’Ouverture, elles empruntent la gestuelle d’un chef d’orchestre, associée à de courtes séquences sonores où dominent la stridence et le cliquetis. À mesure que de nouveaux timbres apparaissent (piano préparé, guitare électrique, basson, harpe, etc.), les mains signalent ce qu’elles peuvent faire habituellement (jouer, soigner, insulter). Le mouvement médian se veut plus lent et doux, afin de faire entendre les lames vibrantes de plusieurs diapasons manipulés dans ce castelet particulier. Enfin, le Finale poursuit l’invasion de la boîte par des objets résonnants du quotidien (élastiques, gobelets, etc.). Surtout percussive, cette section nous laisse entre fascination et lassitude.

Pour les deux volets de Run Time Error (2014), nul besoin de l’Oslo Sinfonietta encadrant Stene puisque Steen-Andersen est seul à arpenter The Black Diamond, extension contemporaine de la Bibliothèque Royale de Copenhague, qui abrite musées et auditorium. Filmé un micro à la main, le compositeur se mue en percussionniste, frappant sans mollir des éléments préexistants (rampe, lustre, porte, etc.) ou placés par lui sur un parcours (seau, tasse, échelle, etc.). Le tout est ensuite retravaillé, sans vraiment gommer l’origine concrète des bruits disponibles. À l’instar de son compatriote Lars von Trier, le musicien attentif à l’image ne manque pas d’humour, mais là encore, l’intérêt musical nous échappe…

Pour les plus curieux, des bonus dévoilent en temps réel les deux trajets empruntés par le compositeur les 30 mars et 1er avril 2013, avec sons et images d’origine, tandis qu’un dernier documentaire permet au créateur de s’exprimer sur ses recherches en général, puis sur ce projet en particulier (près de quinze minutes mêlant répétitions et entretien, avec sous-titrage en anglais exclusivement).

LB