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Chroniques
Compositeur en devenir
un portrait de Michael Nyman
Pour beaucoup, le nom de Michael Nyman (né en 1944) fut découvert sur le générique du premier long métrage de Peter Greenaway, The Draughtsman's Contract (Meurtre dans un jardin anglais). Combien savaient alors – et encore aujourd’hui – que ce compositeur, qui accompagnerait le réalisateur de 1982 à 1991, faillit ne jamais s’engager sur la voie de la création ? En effet, après des années de cours privés, l’étude du piano et de la musicologie, le Londonien se sent peu d’affinités avec les tendances musicales de l’après-guerre, dans lesquelles il baigne au sortir de l’adolescence. Il choisit alors le silence et se consacre, douze années durant, à une activité de critique musical et de musicologue.
Si la musique sérielle n’intéresse pas Nyman, il en est autrement de celle qu’il est un des premiers à nommer minimaliste. Il se tourne vers les Etats-Unis, écrit son livre Experimental Music : Cage and beyond (1974) et se remet à composer en 1976 – encouragé par Reich qui, lui aussi, ne souhaite pas être un satellite des planètes Stockhausen et Boulez. Il pose les jalons du Michael Nyman Band comme ceux de son nouveau style, notamment avec In Re Don Giovanni, une variation sur seize mesures de Mozart – un compositeur découvert dans ses jeunes années. En parallèle des commandes pour le cinéma, les œuvres variées se succèdent – son premier quatuor (1985), son premier ouvrage lyrique (1986), etc.
Le portrait réalisé par Silvia Beck n’est pas aussi profond qu’il s’annonce, car il y a bien des scories dans ces maigres cinquante-deux minutes. Certes, on y parle de musique – surtout les interprètes, partagés entre le plaisir de jouer fort et la douleur physique d’exécutions exigeantes –, mais le principal protagoniste semble à un tournant de sa vie, en quête de ses racines polonaises autant que d’une reconnaissance comme photographe et vidéaste. Jouer La Leçon de piano sur un instrument désaccordé est révélateur. Avons-nous ici un sujet narquois et fuyant, ou une portraitiste nostalgique qui, au lieu d’évoquer des opéras sur fond de psychanalyse et de dadaïsme, préfère écouter deux fois An Eye for Optical Theory ?
Qui aime sans réserve la musique de Nyman s’intéressera au second DVD de ce coffret. Le premier nous avait familiarisés avec l’orchestre de cet amateur de structures répétitives et d’emprunts ; celui-ci le propose en concert, au Studio Halle, le 22 octobre 2009 – que filme souplement Olivier Becker. Aux côtés des tubes cinématographiques - Chasing Sheep is Best Left to Shepherds, Prawn Watching, Knowing the Ropes, Miranda, Against Constancy, etc. -, on rencontre des nouveautés, telles The Musicologist Scores (21’31) écrite en hommage à Händel, un « recycleur par excellence ».
LB